Cette
fois-ci TVM a choisi de présenter un face-à-face entre deux techniciens
appartenant chacun à un camp politique. Ce fut la version arabe de l’émission
réussie de notre confrère Yedali Fall, «le débat». Elle a opposé l’actuel
ministre de l’économie et du développement, Sidi Ould Tah à Mohamed Ould Abed
qui a occupé le poste durant la première transition (2005-2007).
Je
ne reviendrai pas sur le contenu, les deux hommes ayant chacun défendu ce qu’il
croit être «ses» vérités. Avec quand même la reconnaissance, plus ou moins
prononcée par moment, de la conformité et de l’importance pour la Mauritanie
des performances mises en exergue par les partenaires au développement.
Sur
le plan de la forme, le débat était sérieux, animé, passionné par moments, mais
au niveau des débatteurs. Pas de dérives verbales ni de faux-fuyants.
Avec
un léger avantage pour Ould Abed qui pouvait se permettre toutes les assertions
pour déstabiliser son vis-à-vis. Il pouvait aussi se targuer, et il a raison de
le faire, de défier sur son comportement exemplaire – compétence et droiture –
durant son exercice. Tout en évitant de prendre sur lui les agissements de ses
pairs et du sommet de l’Etat de l’époque. Cela demandait de l’habileté et ce
fut sa grande réussite.
Quand
il dit qu’il avait dénoncé à l’époque le règlement de la dette – en fait 135
milliards qui ont fait l’objet d’un protocole d’accord entre la BCM, le
ministère du développement et celui des finances qui en était l’artisan
principal avec la présidence du CMJD. Il a émis en son temps les questionnements
qu’il fallait pour mettre en doute la régularité d’une telle procédure et sa
justesse. Nous en avons compris que l’opération est bien «sale» mais que le
ministre de l’époque avait essayé en vain de la contrer. C’est comme la
facturation des 32 kilomètres de route séparant Rosso de M’Bignik qui ont été
aussi l’occasion de malversations avérées.
A
la fin de l’émission, je me retrouvais en train de regretter que la politique
arrache à la Mauritanie ses meilleurs techniciens en les sortant de leurs
domaines précis et utiles pour une scène où ils se perdent et s’engluent dans
la nasse. Tous ces cadres de la BCM, de la SNIM, des ministères des finances,
du développement, ces ingénieurs, médecins, techniciens supérieurs qui, du jour
au lendemain, se lancent dans un espace pourri par les «hableurs», faussaires
de tous acabits.
En
2003, on avait beaucoup parlé de la candidature d’un éminent professeur de chez
nous. Une grande personnalité dont la compétence et le sérieux, mais aussi la
renommée internationale, n’étaient pas à remettre en doute. J’étais contre. Je faisais
partie de ceux qui disaient ceux-ci : «Il
n’existe pas deux Mauritaniens qui excellent dans le domaine de compétence de …,
alors que toute le monde ici fait de la politique. En le présentant, vous
privez la Mauritanie d’une autorité scientifique, vous lui demander de
pratiquer un art dont il ignore tous les mécanismes et vous ajoutez au
surpeuplement d’une scène finalement saturée».
En
2007, nous avons vu comment l’ambition politique a emporté Zeine Ould Zeidane,
un jeune qui avait tout son avenir devant lui et qui s’est retrouvé prisonnier
dans le ventre d’une hydre à sept têtes. Personne ne doute de ses capacités
techniques, mais personne non plus ne croit à ses aptitudes politiques, même s’il
a eu un score plus qu’honorable (15%).
Combien
de Ould Zeidane, de Ould Abed, de Lô Gourmo, de Ould Moulaye M’Hammed…, et
avant de Ould Daddah, de Ould Cheikh Abdallahi… (vous en trouverez plus que moi
et dans toutes les couches sociales), combien de techniciens devrons-nous
sacrifier à la politique à la fin ?