Abderrahmane Ould Bezeyd, enseignant de son état, issu d’un milieu maraboutique authentique et enraciné, s’immole non loin de la présidence. Il arrive un peu après 21 heures devant les grilles des affaires étrangères, juste en face de la sentinelle de la présidence. Il prend un bidon et se verse le gasoil sur le corps avant de faire feu. Les militaires essayent d’éteindre les flammes avant d’appeler les pompiers et d’amener la victime à l’hôpital.
On peut se poser des questions sur le moment choisi par Ould Bezeyd : en général quand on agit de la sorte, c’est pour se donner en spectacle, alors que l’intéressé a agi en pleine nuit, à une heure où il y a peu de passants. Aussi sur ses motivations : quelqu’un qui a un travail, qui refuse de rejoindre son poste et qui est révolté par la prise de mesures administratives à son encontre.
Mais quand un homme agit de la sorte, on est obligé de marquer un temps de méditation. De méditation et d’effroi. Qu’est-ce qui peut pousser un homme à chercher à se tuer, surtout en se brûlant ? Quelle attitude mentale, quels prédispositions intellectuelles, quelle idéologie peuvent amener un mauritanien, de surcroit de milieu de savoir cultivant la non violence, un homme de condition sociale aisée, qu’est-ce qui peut amener cet homme à vouloir se donner la mort ?
On peut toujours se rappeler que nous sommes dans une atmosphère où les leaders d’opinion cherchent à instaurer la culture de la désespérance qui est le facteur déterminant de ces comportements. Les appels au sacrifice lancés de temps en temps par les plus en vue de nos leaders d’opinion, créent une psychose surtout si certains Ulémas laissent entrevoir la porte du suicide comme une possibilité d’accéder au Paradis à moindre prix. Pourtant ce geste doit amener nos Imams à faire des prêches véhéments sur la vision de l’Islam de tels actes.
Nous restera quant à nous cette objection de conscience, cette interpellation que constitue pour les autres l’acte de se donner la mort.