C’est une vieille revendication des acteurs de la presse qui a été satisfaite au terme du conseil des ministres d’hier : la dépénalisation des infractions de presse. Cela veut dire que le journaliste ne courra plus le risque de la peine de l’emprisonnement pour certains faits comme l’offense, la diffamation…
C’est naturellement le ministre de la communication, Me Hamdi Ould Mahjoub, qui a expliqué les nouvelles dispositions. Il a indiqué que l’ordonnance N° 17-2006 qui a constitué un bond en avant dans l’exercice de la liberté d’expression, que cette ordonnance avait besoin d’être améliorée pour mieux l’adapter aux exigences nouvelles de liberté et de protection pour le journaliste. Quelques articles de cette loi ont été modifiés pour permettre l’annulation des peines d’emprisonnement prévues. Les articles 35, 36, 40 et 41 ont perdu leurs alinéas prévoyant cette peine. Offense à chef d’Etat, à diplomates ou à pays étrangers, la diffamation pour laquelle on courait la peine d’emprisonnement, c’est désormais l’amende qui est prévue pour sanctionner de tels délits.
Considérant le rôle évident de la presse dans le raffermissement de la démocratie dont elle reflète l’état de maturité, les pouvoirs publics, dit le ministre, "ont choisi de lever le cachet criminel des infractions journalistiques et de le remplacer par un mécanisme d'exemption du journaliste de la peine d'emprisonnement suite à la collecte et au traitement de l'information". Seules vont subsister les articles criminalisant l’incitation à la haine, promettant le racisme et le crime. Pour ces délits, la peine d’emprisonnement est naturellement maintenue.
En moins d’un an, la Mauritanie a pu lancer la loi organisant la presse électronique, celle instituant la libéralisation de l’audiovisuel, celle transformant les institutions publiques d’information (radio et télévision) en société anonyme pour leur permettre de devenir de véritables services publics… Des avancées notoires qui vaudront certainement à la Mauritanie de gagner des points dans le classement des pays par respect de la liberté d’expression.
«Après cinq années d’alternances parfois heurtées entre pouvoir militaire et pouvoir civil, le pays se stabilise peu à peu. Concernant la presse, la législation est la plus favorable de la sous-région». C’est le lancement du rapport sur la Mauritanie fait sur le site de Reporters sans frontières (www.rsf.fr) qui précise : 0 journalistes tués, 0 collaborateurs tués, 0 journalistes emprisonnés, 0 collaborateurs emprisonnés, 0 net-citoyens emprisonnés.
Un acquis qu’il faut savoir préserver. D’abord par une plus grande prise de conscience du rôle de la presse, le recadrage de nos préoccupations et l’engagement responsable au service des causes justes. Personne ne peut dénier au journaliste son droit à l’engagement. Mais aucun journaliste n’a le droit d’oublier son obligation à la responsabilité. Les insultes, le dénigrement, la fausse information, l’engagement vulgaire… ce n’est pas du journalisme. Et les organes et les personnes qui le pratiquent peuvent exister un moment, tromper un temps, mais restent condamnés à disparaitre.
La dépénalisation doit s’accompagner d’un renforcement de l’autorégulation, surtout en l’absence d’une HAPA efficiente. Mais aussi de la célérité au niveau de la justice pour le traitement des questions liées aux infractions de presse. Seuls les procès peuvent aider à ancrer les notions de liberté et de responsabilité et donner en même temps au citoyen la possibilité de défendre sa dignité et son honneur s’il se trouve bafoués au terme d’un article. Il ne faut pas croire que les signatures anonymes peuvent couvrir ou dégager la responsabilité. Non ! attention donc.