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mardi 14 juin 2011

Les chiffres parlent

J’ai toujours été intrigué par la facilité pour le Mauritanien normal de jongler avec les chiffres. Je ne sais pas si cela nous vient de loin, mais je suis sûr que la gestion hasardeuse et même dangereuse des trois dernières décennies a cultivé cette propension a citer les chiffres sans faire attention, sans se dire qu’un chiffre exprime une vérité et non une approximation.
Je me souviens que quand on est allé en Côte d’Ivoire, on ne pouvait pas savoir combien de Mauritaniens étaient installés dans ce pays. Les chiffres qu’on nous avançait variaient entre 30.000 et 200.000. Parfois c’est une seule personne – de surcroit un diplomate – qui vous dit : «c’est entre 30 et 200.000 personnes». Et combien de fois vous entendez : «untel n’a rien fait, il a juste bouffé un milliard d’ouguiyas». Mais un milliard, c’est quelque chose. Prenez vos calculettes et essayez de savoir combien de minutes depuis l’Hégire jusqu’à maintenant. Moins de huit-cent-cinquante millions de minutes se sont passées. Un milliard c’est beaucoup. Un chiffre, c’est important.
Je vous invite à aller sur le site www.tresor.mr et à regarder les données. Vous allez être surpris. On nous dit que les caisses de l’Etat ont été vidées, que les recettes fiscales ont baissé à cause des passe-droits accordés aux importateurs proches du régime.
Et on prend l’exemple du fonds national des hydrocarbures. Sachez qu’au 30 du mois d’avril 2011, les revenus de l’Etat tirés du pétrole encaissés atteignaient un peu plus de 6.214 millions dollars américains, (6 214 337,41 USD) soit l’équivalent d’un peu plus de 1.692 milliard d’Ouguiya (1 692 909 797.23 UM). A cette même date, le solde du compte FNRH était d’environ 58.905 millions de dollars US (58 905 077.49 USD), soit l’équivalent de 16.579 milliards d’ouguiya (16 579 339 368.6 UM). Savez-vous aussi que les entrées douanières ont doublé pour le premier semestre 2011 par rapport à 2010 (42 milliards UM au lieu de 21), triplé et même quadruplé par rapport aux années d’avant ?
On va rarement à la source d’information, parce qu’on préfère l’approximation à l’exactitude du chiffre. Sinon comment comprendre que la plupart de nos opérateurs – politiques, médiatiques … - préfèrent s’en remettre à la rumeur sur le chiffre plutôt qu’à la donne officielle. On me dira que l’épisode des faux chiffres a détruit la crédibilité de la source officielle. A quoi je rétorquerai qu’il n’y a rien de pire que les supposés de la rumeur. Et qu’en tout cas, des sites comme celui du trésor public contribuent à renforcer la tendance transparence. Il faut donc y croire.