C’est un accident survenu la veille sur l’avenue Moktar Ould Daddah, en plein centre-ville de Nouakchott qui vient rappeler combien nous coûtent les mauvais comportements sur nos routes. Entre ceux qui croient qu’ils sont les seuls usagers et refusent en conséquence d’attendre le feu vert, de laisser aux autres le temps de passer, et ceux qui sont toujours pressés d’arriver là où ils vont même si rien ne les presse vraiment, entre ceux-ci et ceux-là les usagers des routes mauritaniennes meurent par dizaines chaque année. Et rien ne semble arrêter la course folle.
Toutes les parties semblent largement partager la responsabilité des morts sur nos routes. A commencer par les services de sécurité, police et gendarmerie dont les postes de contrôle ressemblent plus à des passages obligés pour paiement de tributs. Par les services du transport qui sont incapables d’imposer un minimum de normes techniques : l’une des causes des accidents et surtout de leurs effets meurtriers est la non-conformité des véhicules. Par l’irresponsabilité des usagers qui n’ont aucun respect pour les règles, les feux, encore moins pour l’autre qui compte pour moins que rien. A ce titre, le chauffeur mauritanien est le moins poli, le moins prévenant de la planète.
Ailleurs, la priorité est, en fonction du geste de courtoisie, à celui qui entre, ici on ne peut compter là-dessus. Parce que la tenue sur la route est celle du guerrier de basse catégorie, celui qui chaparde et utilise la force pour cela. Le réflexe du «gazreur» trouve ici toute son explication.
Quand on me parle de notre jeunesse et de l’éventualité pour elle d’être gagnée par la fièvre du printemps arabe, je me dis qu’il lui reste encore beaucoup à faire. Si c’est la jeunesse huppée de Nouakchott qui doit mener la révolution. Comment incarner un monde meilleur quand on est incapable d’attendre son tour devant un feu ou dans une boulangerie ? comment être porteur d’un message novateur quand on ne peut respecter la personne humaine pour ce qu’elle est et non pour ce qu’elle a ? comment revendiquer l’Etat citoyen quand on ne respecte aucune règle ?
…m’enfin, il nous reste beaucoup à faire pour espérer que quelque chose changera pour nous. Il faut d’abord changer ce qu’il y a en nous.